Bach Rythmicien

Parmi les innombrables couronnes de laurier qu’on lui tresse, Jean Sébastien Bach se voit rarement attribuer celle de rythmicien.

Son art rythmique, bien que parfaitement accompli, est étroitement assujetti à l’art du contrepoint et les métriques qu’il utilise (2, 3 ou 4 temps, binaires ou ternaires) sont courantes.

Un aspect cependant mérite d’être remarqué: J.S. Bach emploie à plusieurs reprises des métriques notées à 3/4, mais jouées dans des tempi si lents qu’elles sont perçues comme des mesures à 6 temps.

Ce sont parmi les œuvres de Bach, des compositions extrêmement belles et touchantes, aux mélodies extraordinaires.

Le balancement  à trois temps, associé à un tempo très lent donne un sentiment caractéristique d’apesanteur et de dilatation du temps. Cette lenteur ne correspond pas à la notion généralement admise pour une musique rythmée, mais il y a bien là une caractéristique rythmique spécifique. Pour en percevoir l’intérêt il faut savoir se mettre à l’unisson de cette pulsation très lente.

Dans la symbolique de cette époque, le nombre 3, associé au symbole du cercle, est un symbole de perfection céleste par opposition au binaire qui, lui, est associé à l’imperfection terrestre. On retrouve cette symbolique dans la notation actuelle: Le symbole C (pour une mesure à 4  le C barré (pour une mesure à 2 temps) symbolisent l’imperfection d’un cercle brisé.

Voici 4 exemples particulièrement intéressants qui illustrent la richesse des mélodies produites par cette mesure. Les trois premiers sont issus du mouvement lent d’un concerto :

— Le Concerto BVW 974 d’après Alessandro Marcello : l’un des tubes de Bach !
• version avec partition :

 

• version par Glenn Gould

 

 

— Le Concerto Italien (le terme « italien » signifiant une primauté accordée à la mélodie par rapport à l’art allemand du contrepoint).
• la version par Glenn Gould est remarquable par le parti pris d’un tempo très lent :

— Un autre thème, joué dans un mouvement adagio très lent, se retrouve à la fois dans le Concerto pour Violon  BVW 1042 et dans le Concerto pour clavier  BVW 1054. Son motif rythmique (un « gimmick » dirait-on aujourd’hui) est une véritable trouvaille.

• version concerto pour violon par Anne-Sophie Mutter :

 

 

Citons, pour terminer, le N° 25 des variations Goldberg.

• version par Glenn Gould (là encore dans un tempo incroyablement lent):